Dans cette section, nous allons faire un tour de quelques notions de vocabulaire et des techniques utilisées par Sophie Martin. Tout commence avec l’argile…
Argile : roche sédimentaire et meuble formée par la décomposition de roches primitives (feldspaths). Imperméable, lorsqu’elle est imbibée d’eau, elle devient plastique et façonnable.
Céramique : Terme général qui englobe tout produit à base d’argile, cuit et durci à des températures variant de 600 à 1350°C, tel que faïence, grès, porcelaine, tuiles, briques etc
Barbotine : Mélange liquide de terre et d’eau utilisé pour coller deux parties d’une pièce encore molle, ainsi que pour réaliser des moulages.
Emaillage : action d’appliquer un enduit vitrifiable à la cuisson sur une pièce
Couverte transparente : enduit vitrifiable qui fond à température égale à celle de la pâte de la poterie, rend la poterie imperméable mais n’en modifie pas la couleur d’origine
Engobe : argile liquide colorée ou non, utilisée pour recouvrir et faire des effets décoratifs sur une pièce céramique
Oxydes métalliques ; matières utilisées en cuisson céramique pour leurs propriétés colorantes, en exemple le fer, le cuivre, le cobalt pour des effets respectivement brun, brun-vert et bleu soutenu. Utilisés également non cuit ainsi que les pigments minéraux naturels (fabriqués à Roussillon en Provence notamment), mélangés à la gomme laque servant de liant et fixateur, ces pigments sont posés sur l’objet en une patine et ce après une unique cuisson à 1000°C.
- TERRES CUITES
Pour réaliser une terre cuite, Sophie Martin modèle d’abord la sculpture en argile qu’elle évide avant la cuisson. Cette précaution permet un séchage homogène et surtout d’éviter des risques d’explosion à la cuisson lié à un phénomène de retrait de la terre.
L’œuvre sèche à l’air libre pendant plusieurs jours, avant d’être passée au four céramique autour de 1000°, environ 8 à 12h. On laisse le temps pour un refroidissement lent dans le four resté fermé. Ensuite, Sophie Martin applique une patine composée de pigments minéraux naturels fixés à la gomme laque. Cette résine d'origine animale (sécrétion de papillon), diluée avec de l’alcool à vernir, nous vient d'Asie, connue pour sa grande tradition de bois laqués. Elle permet de fixer la couleur sur la terre poreuse après la 1ère cuisson (le dégourdi).En séchant les pigments reprennent leur couleur et leur effet poudreux. Sophie Martin a une prédilection pour cette association plutôt que la cire qui fonce la couleur. Cette technique et ces matériaux sont ceux utilisés par les ébénistes. Sophie Martin a d’ailleurs été formée par l’un d’eux à Mougins en 1999.
Une fois la gomme laques et les pigments fixés, il y a plusieurs passages afin d’obtenir des effets de profondeur pour accentuer les volumes. Pour les dernières finitions, on applique au pinceau un vernis sur les reliefs. Ceci magnifie la pièce.
- BRONZE
A partir du modèle en argile, le mouleur prend une empreinte de l’original pour fabriquer un moule en élastomère avec une coque rigide en plâtre ou résine. Une fois le moule prêt on le remplit de cire chaude pour faire une copie creuse en cire de la sculpture. Une fois refroidie, l’épreuve en cire est démoulée puis retouchée pour supprimer les imperfections et être au plus proche du modèle. Un noyau en plâtre est coulé dans la cire maintenu de l’extérieur par un réseau de tiges de cire (jets et évents) qui permettra l’évacuation de la cire et l’arrivée du bronze.
L’ensemble en cire est plongé plusieurs fois dans un bain à base de silice, pour former une coquille réfractaire. Cette coque est ensuite cuite dans un four, la cire fond et s’échappe :c’est ce qu’on appelle la « cire perdue ».
Le bronze est fondu (à environ1100°C) dans un creuset puis coulé dans le moule vide. Il prend la forme de la sculpture dans la coquille. Une fois le bronze refroidi, on casse la coquille réfractaire. Il faut ensuite débarrasser la sculpture des jets, des évents, et d’éventuels résidus de plâtre. On évacue également le noyau de plâtre à l’aide d’un compresseur.
Les trous laissés par les pointes ayant servi au maintien du noyau et celui de l’alimentation sont rebouchés à la soudure, les volumes complétés au niveau des évents coupés. Les bronzes sont ensuite retravaillés par ciselure. On peut ensuite appliquer une patine qui vient colorer le métal. Elle est obtenue par une application tamponnée au pinceau des différents produits chimiques (acides, nitrates oxydes) qui réagissent entre eux et sur le bronze sous l’action de la chaleur du chalumeau. C’est la maitrise et la réussite de cette alchimie qui donnera sa couleur, ses nuances et sa profondeur. Il n’est pas rare qu’une patine nécessite quinze à vingt couches différentes. Enfin, la sculpture est lustrée à la cire pour révéler toute ses nuances et sa beauté.
La pièce est numérotée de 1 à 8 en chiffre arabe, et de 1 à 4 en chiffre romain pour les épreuves d’artistes maquées « EA». La marque du fondeur est apposée par un cachet afin de garantir l’unicité de chaque œuvre. Sophie Martin collabore avec la fonderie Avangini pour réaliser ses bronzes.
- RAKU
Cette technique a été créée au XVIe siècle, par Chojiro Raku au Japon, pour élaborer une poterie brute liée à la cérémonie du thé.
Les modèles de Sophie Martin sont d’abord modelés, séchés et cuits à 1020°. Puis, dans un second temps, avec le concours de céramistes tels que Sandrine Hamel et Barbara Daeffler, les pièces sont émaillées et subissent leur deuxième cuisson autour de 900°.
Les sculptures sont sorties incandescentes du four chaud (gaz ou bois) pour être enfouies dans un bac de sciure. Le choc thermique provoque des craquelures sur l’émail, et l’enfumage va noircir ces fissures de surface ainsi que toutes les parties non émaillées (poreuse).
Raku au crin
Il se distingue du raku par l’absence d’émaillage, Sophie Martin polit la terre dite « verte » avec une agate jusqu’à ce que la pièce soit brillante et douce au doigt. Après la première cuisson dans son four céramique, la deuxième cuisson a lieu chez la céramiste, pendant laquelle des crins sont posés sur l’objet à la fin de la cuisson et donc brûlent laissant des lignes noires. Cela suit le même principe d’enfumage.
- LE VERRE
Le principe est le même que pour le bronze, d’après le modèle en argile, on crée un moule en élastomère qui permet de faire une cire (moule réfractaire) comme pour les bronzes. Le verre broyé (cristaux ou poudre de verre colorée), placé dans le moule, est fondu lentement dans un four à haute température (800 à 950°C). S’en suit un refroidissement lent (recuit) pour éviter les tensions. Le verre est ensuite retravaillé, poncé, sablé ou poli
Sophie Martin s’associe avec Servane Blat ( « Cervanes ») pour créer trois modèles de manchot en verre d’environ 15cm.
- RESINE
Le processus de création d’une œuvre en résine suit le même principe que pour les œuvres en bronze ou en verre, d’un modèle en argile est créé un moule en élastomère (négatif de l’original) avec une coque dure dans lequel on vient couler la résine avec un durcisseur. Après avoir démouler la sculpture, il faut éliminer les excédents de résine ou les imperfections avec une lime ou un outil de ponçage. On peut ensuite polir la sculpture pour lui donner un aspect brillant et lisse, ou appliquer une patine pour donner de la texture.
Sophie Martin a fait le choix d’utiliser la même numérotation que pour les bronzes afin d’éviter l’esprit de série. Le fondeur utilise 2/3 de poudre de bronze pour 1/3 de résine ce qui ajoute de la préciosité à la pièce.
La résine permet de faire des œuvres plus grandes comme le manchot de Castelbrac (2m de hauteur, images ci-dessous) et des œuvres à moindre coût pour mieux se projeter sur une réalisation en bronze.